Tempo :
des ateliers qui nous laissent sur notre faim
Une série de quatre ateliers sur l’éditorial et le workflow a eu lieu en mai en Bretagne : à la sortie, c’est le scepticisme, voire la panique face à l’ampleur de la tâche... et ce, quelques semaines à peine avant le grand saut dans le vide, le 4 septembre prochain.
Remplir des cases de 25 minutes le midi et 40 minutes le soir, à moyens constants-: un vrai défi pour les équipes bretonnes !
Les contributions parisiennes suffiront-elles ? Des reportages, des dossiers, des magazines et des chroniques seront fournis, dont un certain nombre incontournable pour chaque édition, nous dit-on. Soit, mais Ici Midi et Ici Soir s’annoncent bien indigestes avec ces nouveaux ingrédients !
Pendant ces groupes de travail, nous nous sommes transformés en marmitons, pendant 2 ou 3 heures. Un temps de préparation un peu trop court, à notre goût.
Lors des échanges, des écueils sont rapidement apparus :
En termes éditoriaux : un menu indigeste avec des plats sans saveur et de la sueur...
- Le risque d’un tunnel d’informations de 40’ totalement indigeste, avec une succession de plateaux, de chroniques, d’invités et une place limitée aux séquences de reportages et d’images de terrain. Le tout sans grande cohérence (quand les sujets sont imposés par Paris), ni de rythme.
Un bref retour d’expérience, suite aux essais techniques réalisés à Bordeaux interroge : « On s’ennuie ! 40’, c’est sacrément long. »
- Des reportages qui pourraient être moins nombreux et de moindre qualité... Avec la part belle faite aux plateaux, aux chroniques et aux invités, moins gourmands en main d’œuvre...
- Un risque grave de diffuser des informations fausses ou incomplètes après qu’elles seront passées dans la moulinette de la chaîne de fabrication. En effet, il est légitime de s’inquiéter du devenir d’une info recueillie sur le terrain et envoyée dans le serveur, et qui sera ensuite reprise par des collègues parisiens qui vont les monter pour fabriquer un desk à destination des autres régions.
- Le risque de dilution de l’information régionale et d’un appauvrissement de l’information nationale qui ne pourra pas être actualisée après 18h30. Là encore, on veut nous rassurer : « La région reste maîtresse de son journal ; on va garder la main ! ». Mais sans trop savoir comment bien articuler et séquencer l’information locale et nationale.
- Des journalistes sur le terrain de plus en plus sollicités pour des directs.
Tous ces éléments font craindre une perte d’identité de France 3 Bretagne.
En termes organisationnels : trop de casseroles sur le feu pour une seule femme ou un seul homme.
- Combien de cuistots serons-nous autour de la table ? A ce jour, la direction régionale persiste à dire que nous n’aurons aucun renfort malgré les alertes et l’inquiétude des salariés qui expliquent, chiffres à l’appui, qu’ils ne pourront mener à bien leurs missions sans moyens supplémentaires.
Pourtant, la PDG de FTV a annoncé un renfort de 60 ETP pour le Réseau. La Bretagne, mono antenne, n’aurait-elle donc pas droit à sa maigre ration ?
Les élus craignent qu’on en arrive à ce que les salariés se battent entre eux pour essayer de grappiller les miettes qui leur permettront de répondre à leurs missions. « Si on rajoute un chef d’édition, ce sera un journaliste en moins », entend-on par exemple.
- Le risque de surchauffe pour certains métiers, comme les chefs d’édition, les scriptes, les vidéos, les monteurs, les rédacteurs en chef adjoints et les présentateurs.
- A cela s’ajoute une inquiétude légitime sur les moyens techniques. En effet, les outils sont différents entre Paris et les régions, et certains n’ont pas été conçus pour travailler en réseau au quotidien.
Ainsi, tout un chacun devra rester rivé sur Newsboard pour ne pas rater l’alerte annonçant l’arrivée d’un sujet de Paris, à l’heure cruciale du journal.
- L’épuisement guette avec des amplitudes horaires bien indigestes. De 8 h à 20 h, pour nombre d’entre nous. Ce qui nourrit beaucoup d’inquiétude. On se souvient que la direction avait exclu, en instance de proximité, le recours à la semaine de 4 jours, comme demandé par des salariés.
Ce qui est sûr c’est que les amplitudes horaires, elles, risquent de jouer le rôle d’étincelle dans un collectif déjà bien fatigué et qui aspire à plus d’équilibre entre vie professionnelle et personnelle.
- Des horaires décalés pour les journalistes avec une équipe d’actu qui travaillera dorénavant en 11 h/22 h ou 14 h/24 h Il faudra s’adapter aux nouvelles contraintes de nos éditions. Les journalistes sont priés de ne pas faire valoir de contraintes personnelles qui les rendraient indisponibles le soir. « On a tous une vie de famille, mais si on pouvait ouvrir un peu plus d’amplitude dans la vraie vie des gens, ce serait remarquable. » a-t-on entendu.
La philosophie est donc claire : les salariés ont de la chance de vivre une telle révolution de l’offre d’information de FTV, si l’on en croit la direction. Quant à la vie de famille, elle n’est que secondaire et devra s’adapter.
Collègues journalistes, face à ce discours, nous ne pouvons que vous conseiller de revenir au décompte-horaire, seul à même de vous offrir des gardes-fous !
A la sortie des ateliers, les participants ressortent le ventre lourd. Le beau gâteau, vendu il y a un an pouvait paraître alléchant à certains, mais, comme nous le craignions, il manque les ingrédients indispensables pour qu’il soit digeste, à savoir des moyens !
Avant même de passer à table, les salariés peuvent en être sûrs, l’addition sera bien salée !
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Rennes et Brest, le 1er juin 2023 |